Après l’explosion des meublées de tourisme suite au Covid-19, la situation devenait intenable à La Rochelle pour les habitants et les étudiants. Voté au Conseil Communautaire du 20 octobre 2022, le nouveau règlement de l’encadrement des meublés de tourisme à La Rochelle sera applicable à partir du 1er juin 2023. Selon la municipalité, il vise à rétablir un équilibre entre attractivité, solidarité pour les habitants, développement économique et touristique. Nous avons pu interroger l’élue en charge de ce dossier, Marie Nedellec, adjointe au commerce et attractivité locale responsable, cœur de ville, évènementiel et numérique.
Pourquoi cette décision ? A-t-il eu un élément déclencheur ?
M. Nedellec : Il y a plusieurs éléments déclencheurs, notamment les difficultés de logement, qui ne sont pas uniquement dues aux meublés de tourisme mais c’est un élément important. On a une augmentation de 3000 biens en meublés de tourisme en 2 ans sur la commune de La Rochelle. C’est une augmentation très forte. C’est autant de logement qui ne sont pas consacrés à du logement à l’année, ce qui reste notre priorité. D’autre part, c’est du logement étudiant qui devient de plus en plus rare, notamment sur le quartier des Minimes où la proportion du logement touristique au delà de la saison estivale est devenue trop importante. Il nous fallait aujourd’hui réguler l’activité des meublés de tourisme.
Vous avez défini deux zones dites « tendues » ?
M. Nedellec : Une zone tendue est définie par le Ministère, par le biais du préfet. Il y a 10 communes de notre agglomération qui sont en zone tendue, en logement, et cela ne date pas d’aujourd’hui. En fonction de ça, nous avons déjà délibéré en 2019 pour imposer le numéro d’enregistrement et de changement d’usage. Sur la commune de La Rochelle, le phénomène grandissant, nous avons pris une délibération pour réguler. Dans ces zones, les meublés de tourisme sont maintenant limités à un bien, contre 3 auparavant. Cette règle s’applique désormais à tous, que l’on soit une personne physique ou une personne morale.
D’autre part, cette nouvelle réglementation concerne uniquement les logements de moins de 35 mètres carré. Ces biens-là doivent être mis sur le marché en tant que logement étudiant ou pour de la location à l’année. Sur les secteurs les plus tendus, comme le coeur de ville et les Minimes, le système de compensation s’applique. Pour un bien en meublé de tourisme, un autre doit être transformé en logement à l’année. Il y aura des exceptions au changement d’usage temporaire, qui est un dispositif qui existait déjà. Il continuera d’être appliqué pour les personnes physiques uniquement, qui pourront continuer à faire du bail mixte : 9 mois de l’année en logement étudiant, 3 mois en meublé de tourisme.
Cette mesure entrera en vigueur au 1er juin 2023 ?
M. Nedellec : Oui. Nous prenons le temps car d’autres collectivités ont vu leur délibération cassée par le juge pour ces raisons-là, par un laps de temps trop court entre la délibération et l’entrée en vigueur des mesures, ne laissant pas le temps au propriétaire de se retourner.
Des contrôles et des sanctions sont prévus ?
M. Nedellec : Évidemment, ce n’est pas un simple effet de communication. Il y aura un service assermenté pour contrôler les biens et c’est l’amende civile qui s’applique. C’est à la collectivité de saisir le juge, qui peut donner une sanction pouvant aller à une amende de 50 000 euros par logement.
Cette mesure fait-elle l’unanimité ?
M. Nedellec : Toutes les collectivités qui ont délibéré sur ce sujet ont fait face à des recours. Si un recours était déposé, ce sera à la justice de l’étudier, c’est son rôle. On a bien l’intention d’appliquer une régularisation des meublés de tourisme.
La Rochelle suit donc le modèle d’autres villes ?
M. Nedellec : On s’est appuyé sur un cabinet d’avocat spécialisé dans le domaine, le même qui a pu travailler sur d’autres délibérations comme celle du Pays-Basque, qui est passée et qui est encore plus stricte que la nôtre. Le droit à la propriété est dans la Constitution, il est donc difficile de légiférer dessus. Mais aujourd’hui, il faut ajouter à la question des moyens celle de la pénurie de logement. Cette crise du logement ne touche pas que les plus démunies, mais toute la société qui ne trouve plus de biens. C’est une mesure plutôt saluée par la population. Nous avons trouvé un juste milieu, ce n’est pas la mesure la plus stricte qui existe, car l’activité touristique reste un pilier de notre économie territoriale. Pour autant, il y a des besoins primaire et se loger en est un.
Si à l’avenir, cette mesure devenait insuffisante, vous irez plus loin ?
M. Nelledec : On est là pour le bien commun et cela commence par le fait que tout le monde soit logé dignement. S’il y a des mesures plus contraignantes à prendre pour loger les gens alors il faudra les prendre, c’est de notre responsabilité.
Propos recueillis le 28 novembre 2022
Par Maxime Roux et Paul Dandler, Service Civique de l’association